Une Clef, Deux Portes, Trois Vies

Chapitre 14 : Le cheval du dimanche matin

3405 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 05/07/2017 10:47

Je n'ai pas spécialement envie de divaguer mais je n'ai pas non plus le droit de gâcher vos vacances... C'est la dernière fois qu'on se parle, je me suis fais engueuler par Seph', il dit que si deux personnes te parlent tu seras perturbée mais à mon avis c'est plus lui qui te traumatise... de toutes façons tu ne peux pas me répondre alors on se voit après bisous. Ah oui, il te reste huit jours alors profites.


Plongée dans l’obscurité je me réveillais doucement, les yeux humidifiés, lourds et gonflés à cause de la fatigue accumulée, j'étais usée et ne pourrais pas continuer comme ça, je ne pouvais pas tenir avant la fin. Au moins ce mec allait arrêter de me parler et me laisser profiter des derniers instants, je présume. J'étais au bout de ma vie au sens littérale et figuré. Je n'avais pas envie de mourir. L'horloge de ma chambre faisait son bruit de balancier habituel, celui qui à présent me transperçait. Je songeais à échanger mon mortel ennemi, la savonnette contre le temps qu'il me restait. Je me retournai dans mes draps, les yeux vers le plafond, je surchauffais, une fièvre, un coma. Je m'étais endormie dans le canapé donc un de mes frères m'avait portée, j'étais habillée c'était au moins ça. Je changeais encore de coté pour m'appuyer sur mon bras et me lever. Lorsque ma tête tourna sur la gauche je sentis l’oreiller mouillé contre ma joue, conclusion : j'avais bavé. Tel une magnifique carpe hors de l'eau je me mis d’aplomb sur mon séant (mes fesses). Ma chambre et mon corps étaient impeccables, je n'avais pas fait de crises, c'était mieux ainsi. Les volets étaient fermés, le ciel inaccessible, incapable de me donner le moment de la journée. Il devait être très tard, mes yeux s'attardaient sur le réveille, nous étions dimanche, une genre de longue hibernation, Me suis-je endormie le soir ou l'après-midi ? Je me sentis soulagée, la nuit avait été tranquille, par rapport aux autres. Aucun son ne se répercutait dans les murs de la maison, un silence parfait pour mon crane de plus en plus douloureux et pour mon corps bouillonnant. Je pivotais et appuyai sur mes bras pour me mettre debout. Je ressentis le sol froid de ma chambre comme si c'était la première fois, m'avançant vers la porte mes yeux ne quittant pas la poignée lorsque je la tournais. Le temps se suspendait sur le bout de mes doigts dans mon silencieux mouvement. Je m'étais levée sept heures trop tôt un dimanche où mon cours de cheval ne commençait qu'à dix. Dans un placard, je trouvais un mug, après avoir réussi à mélanger le lait et le chocolat, à l'étape du micro-onde j'érigeais un autel à la gloire de Dieu, non pas que je sois croyante mais au cas où ça serve à limiter la casse, on ne sait jamais. Le ding métallique m'indiqua que ma tasse était chaude, j'allai devant la télé que je souhaitais allumer. Mikuo était sur le canapé, la tête ballante sur l’accoudoir. Il n'était pas là quand j'étais descendue, c'était un véritable ninja du déplacement. Se lever à deux heure pour se rendormir sur le canapé après parce que je m'étais levée est adorable, mais car il y a un mais, c'était ce genre de comportement qui faisait que je n'avais jamais eu de copain, trop intrusive comme famille. La main sur l'épaule je le secouai doucement.


« Mikuo, retourne te coucher.


Il ouvrit lentement les yeux pour les ancrer dans les miens, mes pupilles reptiliennes scannèrent son corps de haut en bas, vérifiant chaque mouvement, je sentais son pou extrêmement faible. Ça indiquait une maladie, une anémie ou une fatigue dans son cas.


- Tu as combien d'heures de chevale aujourd'hui ? (Il amorça un mouvement pour se relever d'une lenteur impressionnante, style troisième age.)


- Trois. Lait chaud ? » Je levai ma tasse à la façon d'un toast pour lui montrer mon exploit et ma foi il sembla plutôt impressionné. J'étais fier de moi. Mais il ignora volontairement mon envie de beuverie alors je me contentai de sourire.


Il acquiesça difficilement, contrarié de devenir un poids et se dirigea vers la table de la salle à manger, de mon coté je fis vite chauffer le lait et ajoutai un somnifère. Quoi ? On allait pas me dire que ça sentait pas le coup fourré mon truc. J'avais un peu honte mais avec la force dont il pouvait faire preuve pour résister au sommeil et sa volonté de fer à toujours tout faire dans cette maison, je ne voyais rien d'autres pour le forcer à se recoucher. Je la déposai devant lui, il cligna des yeux à plusieurs répétitions et les passa plus souvent fermés que ouverts, il me remercia malgré tout avant de se rasseoir convenablement sur la chaise, je comptais seconde après seconde. Au bout de quelques gorgées les effets commençaient à se voir, sa main soutenant sa tête de plus en plus basse. Je le soutins sous les épaules à la manière de béquilles, il essaya d'émettre des protestations. Je réussis à le hisser jusque sur son lit, j'haletais tellement il avait traîné les pieds sur le chemin.


« Tu vas le payer ! Je vais te suivre... Dès que je peux ! 


Il ressemblait à l'handicapé de Intouchable, immobile à menacer mais sans pouvoir bouger un majeur, même pas le pouvoir de me rouler dessus. De légers spasmes faisaient de mon frère un ver de terre, un peu comme Kaoru.


- Oui, oui, c'est bien. Je vais juste murer la porte. Je le bordai comme un enfant pour l’humilier un peu plus avant de me redresser à cause d'un mal au dos. Ha l'arthrose de nos jours ! C'était juste un contrecoup d'hier.


- Je passerais par la fenêtre ! (Mais oui bien sûr, il avait le vertige depuis toujours.)


- Je la murerais aussi. Allez, ta gueule et au lit. »


Tellement ridicule comme conservation. Passé le seuil de la porte je ne l'entendis plus, il sembla dormir profondément, les mots d'un mourant, en somme. Les somnifères prévus pour moi à la base étaient d'une puissance dévastatrice. La fatigue commençait à m'attaquer aussi lorsque je passai le pas de la porte. Avant d’oublier je mis mon réveil pour neuf heure et retournai dans les bras de Morphée et m'étalant comme une belle truite sur le lit. Magicarpe attaque trempette.


______________________________________OoO______________________________________



Le réveil qui me fit sauter au plafond et pas une promesse de vengeance accomplie ou un parasite rampant me pompant la chaleur (Je parlais de mes frères). Le son que produit mon téléphone me stressa tellement que je traversai entièrement le pièce pour l'éteindre comme si il s'agissait d'une bombe. Les yeux écarquillés, les mains en avant comme un zombie je m'étais jetée sur le mur et je promets que la maison avait bougé à mon impacte.

Je me roulai au sol, mon orteil ! Le petit, mort écrasé par le mur ! Je retins mes cris ridiculement aiguës, les uns après les autres, Bon sang ! J'émis de petits cris plaintifs avec un effet étouffé entre les grosses bouffées d'air et les claquements de ma mâchoire dans le vide. De plus en plus sous contrôle, je m'habituai à la douleur et me relevai en boitant jusqu'au lit, glorieux! J'enfilai mes affaires de cheval, ma petites merde de doigt encore douloureuse, évolution de macaque ! J'y mettais toute ma haine. Avant de partir pour le cheval j’entrouvris la porte de la chambre de Mikuo, il dormait comme un bébé et n'avait pas bougé depuis. En bas il n'y avait que mon père qui sirotait son café de manière snob, sans un bonjour je me cassai. Le cheval était à un quart d'heure de marche au sens opposé du bahut. Une ville d'à peine vingt milles habitants, population vieillissante où les racailles avaient troqué leur skateboard contre un déambulateur. Elle était bien pour l'enfance, la mort, mais pas la vie active. Ça ne m'étonnait guère que papa soit revenu. Lorsqu'il partit, ce fut très bref, il était juste, juste partit, comme ça, sans nous, je savais qu'il aurait été capable de le faire, mais sans aucunes raisons, c'était idiot... non pas idiot, juste cruel et le fait que je sois un monstre ne me paraissait pas suffisant pour justifier une telle lâcheté. J'arrivai devant le portail de fer qui me séparait du terrain privé de ma prof. D'ici je voyais sa voiture sur le parking, je pénétrai dans la propriété jusque dans l’accueil où le panneau m'indiquait que je montais Ric-Rac, mon cheval préféré et le plus difficile, selon moi. Ce n'était pas un cheval qu'il fallait motiver mais ralentir en permanence, douloureux pour les bras, difficile pour les jambes, il était l’inverse des autres, ce qui était facile devenait difficile et vice versa. J'apportai ses affaires, filet, selle, brosses, bombes, devant la porte de son box. Je n'attendis que cinq minutes pour aller le chercher dans son pré avec les autres cavaliers, Juliette montait aussi un garçon donc nous allions les chercher ensemble dans le pâturage.


« Comment se passent tes révisions pour le bac ? Juliette me héla du fond du pré où son cheval, Lucky, avait décidé de glander pendant qu'elle lui caressait l'encolure. Ce cheval était excellent pour le saut d'obstacle mais je me sentais mieux sur mon Ric-Rac.


- Bah j'ai pas encore commencé, il y a beaucoup de matières et j'ai tellement la flemme de commencer, c'est le plus dure. On a encore pas mal de temps en plus ! (Nous commencions en même temps à les attacher en leur faisant comprendre que ce n'était plus le temps de bouffer.)


- Tu vas t'y prendre comme pour le brevet ? Jamais ?


- Ne me mets pas la pression ! Je vais quand même devoir plancher un minimum, promis, jusqu'ici j'ai tout retenu mais ça ne me vient pas spontanément. » Nous nous dirigeâmes vers la sortie et je sortis en premier pour empêcher les autres chevaux de suivre leurs copains.


Une fois amené au box, je m’attelais à un pansage minutieux de sa robe et de sa crinière, le gris et marron devenant blanc et ses crins blonds se démêlant sous mes doigts. Ce travail était fatiguant mais tellement agréable le contacte du poil, la sensation de l'aider, ma main sur son encolure, sa chaleur, tous cela le rendait bien plus réel que tous les cauchemars de mes nuits, j'avais oublié l'apaisement et l'impression de normalité de ces moments de solitudes et de complicités avec ces bêtes gracieuses, attentives à toutes tes émotions. C'étaient des ''éponges'' à sentiments, un reflet de ce que nous ressentions, peurs, joies, tristesses, stress. Tout pouvant les perturber c'était un sport qui nécessite autre chose que les compétences, le mental, Ric-Rac plus que les autres, même le bonheur pouvait l'influencer. Le cheval soulignait les défauts que tu cachais, si tu voulais progresser, tu devait les admettre et les corriger. A la fin du pansage je sortis de mes pensées avec une impression de repos que je pensais avoir oublié depuis longtemps, c'était la même sensation que lorsque je terminais de chanter. J'étais prête à monter et le cours se passa sans accros. Je ne montais plus pour améliorer ma compétence à cheval mais pour devenir un meilleurs humain. Vers midi trente à la fin du cours nous rebrossâmes les chevaux pour évacuer la sueur de leurs poils et curâmes leurs sabots avant de les remettre au champs où ils retrouvèrent leur troupeau. Je reçus un message de Kaoru qui disait vouloir manger dehors dès qu'ils arrivaient. Pour les attendre je me rendis dans le fond du parc avec Juliette pour regarder les chevaux manger. En s'asseyant au sol je me trempai le pantalon au niveau des fesses, Ju' était morte de rire, moi je râlais, en plus j'avais faim ! Au bout d'un petit moment je reçus un autre texto qui m'indiquait qu'ils étaient arrivés.


« Je te laisse il y a mes frères, on va manger en ville tu veux venir ? Proposais-je à Juliette.


Je me relevai sur mes pieds par une pirouette sans les mains car le sol était légèrement boueux.


- Je serais pas la bienvenue en plus dimanche c'est repas en famille pour moi. Tes fesses sont dégueulasses, peut importe où tu vas ils vont te refouler à la sortie. Elle émit un rire clair et honnête.


- C'est peut être le McDo mais c'est familiale aussi ! Ils ont dit ''venez comme vous êtes'' mes fesses sont comme elles sont. Bon bisou j'y vais. 


- Tu vas te ramener en sentant le poulain dans le resto' ils vont croire que c'est Findus ! (Je la laissai sur ces derniers mots, elle continuait d'attendre son père en arrachant l'herbe autour d'elle pour en faire un petit tas.)


Mes frères étaient devants la carrière des chevaux à les regarder jouer et brouter le temps que je finisse de râler. Mon ventre hurlait sa gloire de la bouffe, on pouvait le dire, j'avais la dalle, alors pour devenir un meilleurs humain je devais manger comme eux, McDo. Il était à cinq minutes du club, une pierre deux coups, je m’entraînais à la notion de facilité, pour devenir une meilleur personne. Après avoir mangé et m’être fait engueuler par Mikuo parce que je le site : « Tu m'as drogué connasse ! » mais il m'énervait aussi, c'était pas vraiment constructif comme commentaire, moi je m'étais excusée proprement, lui, il ne mettait même pas de virgules. En plus on va pas me dire que ça se fait pas en famille, c'était comme l'alcool dans le biberon pour calmer le bébé ! Quand on connaît les doses hein, ça passe. (Ne faites pas ça chez vous j'imitais le beauf de France.) Nous rejoignîmes Cloud, Lucy, Dante et Vergil qui eux avaient mangé Kebab, encore, j’applaudis la réflexion, ils étaient meilleurs humains que je n'étais, je m'inclinais, trop de glandage pour moi ! Dans tout le groupe, il n'y avait pas Aerith, l'atmosphère était (comme par hasard) détendue, même si nous ne parlions pas beaucoup, nous écoutions de la musique dans un parc désert avec des chorégraphies d'enfants trisomiques bourrés, mais c'était pas grave on s'amusait, temps que je le pouvais. Cloud fut le premier à partir vers dix-sept heure parce que : foot, mâles viriles, vestiaires qui puent les chaussettes, savonnette etc... Puis Lucy car elle avait des révisions et enfin les jumeaux var... ils avaient envie. Sans vraiment nous impatienter nous rentrions vers la maison. Là bas, nous pouvions seulement entendre le pianotement des touches de l'ordinateur de papa qui était dans sa chambre et n'en bougerait que pour manger, c'était presque comme moi, en moins intelligent, moins beau, moins fort... moins moi. Je n'allais plus pouvoir mettre de louboutins avec mon enflement de chevilles, mais c'était pas grave, depuis un moment j'envisageais d'engager des esclaves pour porter ma magnifique personne. Du moins c'était ce que j'avais annoncé à mes frères.


« C'est... original comme avenir, si tenté que tu en ai un. Avait annoncé, non sans refréner un rire, Mon frère bleu. Il était dans la cuisine en train de découper le rôti de bœuf pour ce soir, de temps en temps il jetait de petits coups d’œils à son livre de recette, chose jamais ouverte par ma divine moi même.


- Je vais me recoucher j'ai pas assez dormi. Mikuo tu m’appelles pour dîner. Kaoru partit en direction de l'escalier. Mes yeux se reconcentrent sur mon ordinateur où je gérais mes actions et de mes oreilles libres, j'écoutais la télévision en face de moi.


- Vous devez croire en moi je ferais de vous des esclaves libres ! Mon interprétation des paroles du politicien à l'écran, sortit de ma bouche sans que je ne m'en rendent compte.


- Mais qu'est-ce que tu fou ? Demanda mon seul frère en vie. Toujours penché sur la viande rouge, la plaquette de beurre à coté et un couteau dans la main, il ne me regardait pas mais s'était stoppé dans son action, inquiet de mon état de santé.


- Je regarde BfmTV, ils parlent toujours de cette histoire de bombe dans l’hôpital. (Désolée, c'était ma faute.)


- C'est pas ceux qui disent de la merde ? (En l'occurrence, oui.)


- C'est ceux qui disent de la merde. La seule chaîne à la botte de l'état, avec Itélé. Je déteste la télévision ! (Qui retranscrit ce que l'état voulait bien lui dire. Souvent des mensonges, des spéculations aussi des fois pour varier le degré de foutage de gueule.)


- Pourtant tu visses tout le temps ton cul dans le canapé. (Entendis-je spéculer Kaoru derrière moi ?)


- Tu ne devais pas dormir toi ? (Assis dans les escaliers entre les barreaux il écoutait notre conversation comme un bouffon... un faucon ma langue mentale fourcha.)


- Va prendre ta douche, tu pues. » Oui, bon il avait pas tord je m’avouais vaincue, à la douche !



OoO


Une fois cette dernière finie, mon corps se sentit propre et mes cheveux roses à la saveur fruité embaumaient la pièce, ils étaient tellement lourds lorsqu'ils étaient imbibés d'eau. Je me rendis dans le salon pour m’asseoir dos à Mikuo dans le canapé, Il les démêla et les sécha, cela prit environ quarante cinq, une brosse et un peigne dans chaque main, le sèche cheveux sur la table basse, chaque passage m'arrachait des tiffes et me faisait hurler de douleur. A la fin j'avais l'impression d’être chauve mais moins lourde.


« Coiffeur ! M'ordonna Mikuo, il en avait marre de devoir me servir d'esclave ou quoi ?


- Non. »


C'était trop long et dangereux. Ceux qui débutaient pouvaient se blesser et pire, pouvaient me blesser.


Mikuo me fit savoir que le rôti était presque prêt, il repartit l'arroser pour le laisser encore dix minutes dans le four. Kaoru semblait avoir entendu cet appel car il apparut à coté de moi, comme un ninja. Depuis peu, un nouveau Marvel était sortit, son téléchargement venait de finir, je le mis à la télévision pour le dîner. Nous passions une bonne soirée, même si le père se ramèna entre deux punchlines de Deadpool et s’essaya avec nous pour manger. Il finit par repartir au bout d'un moment en nous annonçant que demain c'était la réunion P vs P (profs versus prédator*,*papa). J'avais presque oublié les cours, je remontai dans ma chambre et me mis sous les couettes, le sommeil fut long à trouver, j'avais mal au ventre, me tournais et me retournais d'un coté, de l'autre, sur le dos, le ventre, peluche, pas peluche. Je commençais à perdre patience. Après deux longues heures, je sentis la fatigue me gagner, mais tellement légère que je me forçai à y tomber...



23h59 ….................... 0 h





Jours ______________ -07


Laisser un commentaire ?