Le cycle de la lune bleue

Chapitre 10 : La gourmette

4623 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 26/01/2024 00:26

    - NON !! s’écria Annily prise de panique, VOUS NE POUVEZ PAS, VOUS N’AVEZ PAS LE DROIT DE ME LAISSER EMMENER !!!

    Dans sa fureur, la jeune femme s’était brusquement redressée, envoyant valser sa chaise qui heurta le sol avec fracas. Hawk et Rogue s’étaient tous deux précipités sur elle et lui avaient chacun saisi un poignet pour tenter de la maintenir. Annily se débattit avec colère et donna une violente secousse qui fit lâcher prise aux grosses mains de l’Auror ; mais les longs doigts fins du Maître des Potions restèrent solidement ancrés autour de son bras droit. C’est alors que Rogue sentit les formes régulièrement enchevêtrées d’un métal contre sa paume.

    Un bijou, comprit-il aussitôt. Bien sûr, comment n‘y ai-je pas songé ?! son collier n’est certainement pas le seul élément aux pouvoirs étranges qu’elle a en sa possession… ! J’aurais dû le vérifier la première nuit…

    Le Maître des Potions maudit intérieurement sa négligence pourtant inhabituelle. Tirant sur le bras emprisonné, il souleva légèrement l’extrémité de la manche et découvrit un bracelet en argent d’une extrême finesse, surmonté d’une plaque qui portait une inscription. C’était un nom.

Son nom. : Annily !

Etait-ce réellement l’identité de la jeune femme, ou avait-elle sournoisement plagié l’inscription gravée dans le métal ? Rogue ramena le bras de la jeune fille juste sous ses yeux et lui tourna le poignet de manière à scruter la moindre surface du bijou. N’ayant pas encore remarqué la manœuvre inquisitrice de Rogue, Annily perdit l’équilibre et se rattrapa de justesse au rebord du bureau. Elle tenta de dégager son bras, tout en le dévisageant avec stupéfaction. Mais Rogue ne semblait prêter aucune attention à ses protestations, ni aux regards interrogateurs de l’Auror. Il prit la fine plaque entre ses doigts et la retourna – non sans peine car le bracelet était tout juste adapté à la taille du poignet. Au dos était incrusté un symbole ; un dessin complexe qui lui était étrangement familier… Tirant un peu plus sur les maillons, Rogue l’observa attentivement ; le motif représentait dans la plus grande précision les arabesques calligraphiques et extrêmement minutieuses du mystérieux symbole que le faisceau céruléen du pendentif confisqué avait réfléchi sous les rayons lunaires !

    Hawk avait profité de l’immobilisation de la jeune femme durant cet examen rapproché, pour faire apparaître des liens, et il tendait déjà la main vers Annily pour lui empoigner le bras…

    - Un instant ! s’écria Rogue ce qui fit sursauter la jeune femme. Monsieur le Directeur, avant que cette fille ne soit emmenée au Ministère, j’ai quelque chose d’important à vous dire.

    - Très bien Severus. Nous vous écoutons…

    - Je souhaiterais m’entretenir en privé, rétorqua-t-il.

    - Dans ce cas… Minerva, Guilighan, voulez-vous je vous prie, conduire Annily dans la pièce attenante à mon bureau ? Vous y trouverez un peu de thé accompagné de quelque appétissante douceur au citron. Je ne manquerai pas de vous rappeler au terme notre petit entretien. Guilighan, ajouta-t-il plus doucement, veillez à ne pas trop brusquer notre invitée ; cette jeune personne a connu des moments particulièrement éprouvants, et la malmener risque de l’acculer contre un mur de silence. Si vous voulez qu’elle se confie, le plus judicieux pour le moment est de la mettre en confiance. Je tiens à ce que nous lui accordions les égards relatifs à la réputation très célèbre et hautement estimée du gentleman anglais.

    Confinée dans la petite pièce annexe, Annily attendait, anxieuse, flanquée de ses deux gardiens, aucun d’entre eux n’ayant daigné accorder un intérêt quelconque à la collation proposée. Bien que la jeune femme eût tout le loisir de se ronger les sangs, l’entretien ne dura qu’un court instant. Lorsque Dumbledore vint rouvrir sa porte, son visage d’ordinaire bienveillant exprimait en cet instant une profonde perplexité.

    - Mon cher Guilighan, amorça-t-il tandis que tous réintégraient le bureau en silence, je vous sais gré de vous être déplacé jusqu’à Hogwarts. Un élément nouveau, que je ne peux vous dévoiler sans vérification préalable, m’oblige néanmoins à revoir mes positions vis-à-vis de la missive qui vous a mandaté dans la plus grande confidentialité. C’est pourquoi vous allez repartir sans Annily, que je compte garder quelques temps encore entre nos murs. Aussi je vous invite à prendre congé dès à présent afin de retrouver au plus vite votre poste au Ministère, sans modifier le cours de votre journée. Concernant votre rapport, je vous prierais de passer temporairement sous silence la présence pour le moment inexpliquée de notre jeune invitée, ainsi que les révélations que je vous avais personnellement révélées dans mon précédent courrier et qui viennent d’être certifiées sous vos yeux.

    - J’avais effectivement noté le soin tout particulier que vous aviez pris en m’adressant cette lettre dans la plus grande des discrétions. Requérant mon intervention clandestine dans une affaire à titre personnel, vous m’aviez suggéré de laisser volontairement mes supérieurs dans l’ignorance. Je vais néanmoins devoir rendre des comptes Albus : j’ai emprunté au Ministère l’une des baguettes du Silverbell ; le moindre de leur usage est rigoureusement répertorié.

    - Vous ne pouvez bien évidemment pas nier l’utilisation de la baguette d’Argent auprès de vos supérieurs, concéda le Directeur. Mais peut être pourriez-vous sommairement leur signifier une simple vérification de routine sur un Sorcier lambda bardé de soupçons. Pour le reste, je me chargerai personnellement d’apporter une explication auprès du Ministère, si cela s’avère nécessaire. Permettez-moi d’appeler Feebly afin de vous faire raccompagner jusqu’au Grand Portail.

    A peine avait-il prononcé le nom de l’Elfe que la créature apparut en se confondant en révérences. Hawk ne paraissait pas véritablement enchanté d’être ainsi congédié si brusquement et sans davantage d’éclaircissements, mais il se garda bien de répliquer quoi que ce fût ; les explications viendraient plus tard, de même que la prise en charge administrative de cette femme aux étranges dispositions défensives. Lançant un regard défiant en direction d’Annily, il prit congé et disparut dans le couloir, sans prendre la peine de saluer les professeurs.

     Le cœur battant à tout rompre, réalisant tout juste qu’elle n’allait finalement pas être arrêtée, Annily n’était pas encore revenue de sa stupéfaction. L’effroi qu’elle avait ressenti à l’idée d’être emmenée par un inconnu des forces de l’ordre, à l’instar d’une criminelle, venait de se muer en une véritable stupeur lorsqu’elle avait constaté que la personne à qui elle devait son salut in extremis, n’était autre que Rogue. Elle n’était pas dupe ; Dumbledore avait soudainement changé d’idée suite à son bref échange avec le professeur de Potions, qui venait sans nul doute de lui sauver la mise. Mais Annily était à mille lieux de saisir la cause de ce revirement, lui qui désirait si ardemment se débarrasser de son encombrante et insupportable personne.

    - Pensez-vous que l’Auror saura tenir sa langue ? s’enquit McGonagall, interrompant les pensées chaotiques de la jeune femme.

    - Nous nous connaissons depuis suffisamment d’années pour savoir qu’il ne me fera pas défaut, assura le Directeur. Annily, continua-t-il en se tournant vers la jeune femme, je vous promets que vous n’avez plus rien à craindre. A partir de cet instant, nous ne vous laisserons plus emmener ; vous demeurerez en sécurité entre nos murs.

    - Comment voulez-vous que je vous fasse confiance, avec ce qui vient de se passer ? rétorqua-t-elle avec véhémence.

    - Vous avez entièrement raison, concéda Dumbledore avec douceur, mais nous ne pouvions ignorer les faits troublants issus de nos investigations et qui ont suscité nos doutes à votre encontre.

    - Il s’agit là de constats que je ne peux ni expliquer ni contester, et vous le savez. Vous me savez extrêmement vulnérable au travers de mon amnésie, et vous en abusez. Comment pourrais-je simplement me défendre, quand je ne peux pas apporter la moindre preuve de tout ce dont on m’accuse ? Quelle justification pourrais-je établir à mon égard, alors que je ne connais pas moi-même la teneur de ma propre existence ?

    - Je le conçois Annily… Vous et moi sommes dans une impasse, et seul le temps sera susceptible de nous apporter des éléments de réponses.

    - Et pourtant, vous ne parvenez pas à croire totalement en la sincérité de mon histoire ; vos recherches vous ont troublé, et vous remettez aussitôt en cause la véracité-même du déficit de ma mémoire. Oui, comme vous l’avez dit, nous sommes dans une impasse, un cul-de-sac bardé de grilles, une geôle qui me condamne avant même que mes gardiens aient eu la possibilité d’envisager l’éventualité-même de mon innocence !

    - Je comprends votre désarroi, et j’en suis profondément navré. Peut-être avons-nous réagi de manière excessive, cédant impulsivement au doute et à l’évidence des faits… La remise en cause de votre innocence demeurera toujours Annily, ceci tant que nous n’aurons pas établi la véracité originelle de votre l’histoire. Je ferai néanmoins en sorte que ces tribulations ne se reproduisent plus, vous assurant une sécurité complète au sein de nos murs. Mais pour cela, il est primordial que vous n’omettiez aucun détail.

    - Aucun détail ? répéta la jeune femme. Mais de quoi parlez-vous ?

    - Des bijoux que vous portez, Mademoiselle, intervint Rogue d’une voix glaciale.

    Annily se retourna, surprise.

    - … Mes bijoux ? Que voulez-vous dire ?

    - Nous aimerions en apprendre davantage sur la gourmette qui enserre votre poignet, lui signifia le Directeur avec plus de douceur.

    - Une gourmette ? … mais qu’est-ce que…

    - Cessez donc de reproduire chacune de nos paroles, et commencez par jouer cartes sur table ! intima Rogue sèchement. Donnez-moi votre bracelet, Mademoiselle !

    Désemparée, Annily recula d’un pas tandis que le Maître des Potions se rapprochait dangereusement d’elle, le regard étincelant. Levant instinctivement le bras pour se soustraire aux longs doigts pâles qui fondaient déjà sur sa main, la jeune femme se figea soudain et ses yeux se posèrent sur l’éclat argentin d’une chainette qui ornait son poignet avec la légèreté d’une fibre de coton. Surprise, elle abaissa lentement le bras et rapprocha le bijou de ses prunelles, afin de détailler les maillons d’une extrême finesse qui enchainaient une plaque fuselée, sur laquelle elle déchiffra, stupéfaite, son prénom, gravé dans l’argent.

    - Donnez-moi votre bracelet, répéta Rogue en détachant chaque mot.

    Décontenancée par sa découverte, Annily s’exécuta et lui tendit le bijou sans mot dire. Les longs doigts fins de l’homme s’en saisirent avec une étonnante délicatesse et le remirent à Dumbledore, qui examina le nom lithographié, puis le dos de la plaque avec une extrême attention. Après l’avoir dévoilé au professeur McGonagall, le Directeur s’approcha ensuite de la jeune femme et lui présenta le revers de la gourmette.

    - Connaissez-vous l’existence de ce symbole, et savez-vous ce qu’il représente ? demanda-t-il.

    Annily l’observa un instant, puis replongea son regard interloqué dans celui de Dumbledore.

    - Non, je ne l’ai jamais vu… J’ignorais même que je portais cette gourmette ! je ne l’avais jamais remarquée jusqu’à ce jour…

    - Elle doit très certainement vous appartenir jeune fille, au vu du prénom qui y est inscrit, affirma le professeur McGonagall en s’avançant à son tour. Après tout, il est possible que ce bijou ait lui aussi échappé à votre mémoire, à l’instar de la plupart des détails de votre vie.

    - C’est également ce que je pense Minerva, approuva Dumbledore. Annily, c’est très important : ce symbole vous évoque-t-il quelque chose ?

    La jeune femme observa attentivement l’emblème calligraphié dans le métal, puis releva la tête dans un signe de dénégation.

    - Je regrette, mais de même que pour ce bracelet, je ne me rappelle pas avoir vu ce dessin un jour, et je peux encore moins vous dire ce qu’il représente…

    Annily s’interrompit dans un soupir de frustration. Ressentant un besoin primordial d’échapper à tous ces regards inquisiteurs, elle quitta le fauteuil dans lequel elle se trouvait depuis le début de la réunion et s’approcha de la haute fenêtre triptyque qui illuminait la grande salle circulaire entre deux immenses piliers de pierre, plongeant son regard sur les eaux scintillantes de l’immense lac qui pourléchaient de ses ondes les fondations du Château.

    - Je ne comprends pas pourquoi vous persistez à m’interroger, s’enquit-elle avec amertume, alors que vous êtes en permanence aux prises avec vos craintes et vos incertitudes.

    - Mais votre version des faits est essentielle Annily, insista McGonagall. Il nous incombe certes de démêler le vrai du faux dans une histoire comme la vôtre, mais la variable fallacieuse n’implique pas toujours des faits mensongers ; nous pouvons tout bonnement avoir affaire à des événements modifiés ou erronés.

    - Que voulez-vous dire ?

    - Votre amnésie représente un immense bouleversement psychologique ayant entrainé un grand choc émotionnel, répondit patiemment la Sorcière, ce qui vous a plongé dans un désarroi terrifiant et extrêmement perturbant. Dans l’espoir de vous raccrocher à une réalité, votre cerveau a reconstitué des souvenirs ; dans la plupart des cas, ce sont des réminiscences concrètes ayant échappé au cryptage de votre mémoire. Cependant, au vu du trouble dans lequel vous êtes plongée depuis votre réveil, il est également possible que votre subconscient ait pu les fabriquer.

    - Dans ce cas, pourquoi ne pas au moins m’accorder le bénéfice du doute ? tenta désespérément la jeune femme.

    - Au vu des événements récents qui ont durement marqué notre communauté sorcière, argua le Directeur, nous nous devons d’intervenir envers tout événement extraordinaire. C’est pourquoi votre situation nous oblige à maintenir une certaine vigilance, nous amenant inévitablement à confronter trois cas de figure : une perte avérée de votre mémoire, une altération inconsciente de vos souvenirs…

    - Ou une invention pure et simple de toute cette histoire, termina Rogue venimeux.

    - Il demeure indéniablement certaines informations vous concernant dont nous ne pouvons nier la véracité, poursuivit Dumbledore, imperturbable. Mais où que puisse se situer la vérité, des éléments pour le moins insolites nous amènent aujourd’hui à revoir notre position.

    - De quels éléments parlez-vous ? et quels sont les faits que vous tenez pour vrais ? insista Annily, au bord de la crise de nerf.

    - Vos rares souvenirs mentionnés apparaissent emprunts de réalisme, comme semble le certifier la simple existence de cette gourmette gravée de votre prénom. Votre âge parait sensiblement s’accorder avec la jeunesse de votre visage, cela ne fait aucun doute. Quant à votre provenance natale, je ne puis le confirmer avec certitude mais cela demeure vraisemblable, car vous paraissez maîtriser le français comme votre langue maternelle. Peut-être possédez-vous davantage de souvenirs… peut être avez-vous réellement oublié l’intégralité de votre existence… Cette incertitude demeurera en dépit de tous les moyens sorciers mis en œuvre, puisque, fait incontestable, vous voilà immunisée contre notre Magie. Cet étrange bouclier qui vous protège représente le premier fait insolite, sur lequel nous continuons d’investiguer de manière approfondie. Le second élément curieux qui nous est apparu dernièrement concerne vos bijoux, et plus particulièrement votre collier…

    Annily porta instinctivement la main à son cou, mais ses doigts ne rencontrèrent pas les contours familiers de son pendentif.

    - OÙ EST MON COLLIER ??! s’écria-t-elle avec indignation.

    - Ainsi donc vous admettez avoir souvenance de ce bijou ?

    - Mais oui, évidemment ! répondit-elle avec véhémence. Je le possède depuis ma naissance, c’était un cadeau de ma mère ! Je suis certaine que je le portais lorsque j’ai poussé la porte du Château ! Qu’est-ce que vous en avez fait ? Et pourquoi me l’avez-vous pris ?!

    - Voyons Annily, tenta la professeure McGonagall, essayez de rester calm…

    Mais la jeune femme ignora rageusement le professeur de Métamorphose, et se tourna vers Rogue avec indignation et colère.

    - C’est vous qui me l’avez dérobé, n’est-ce pas ?! accusa-t-elle en le fusillant du regard.

    - Qu’êtes-vous en mesure de nous révéler sur ce pendentif ? demanda Rogue froidement, ignorant délibérément ses accusations.

    - Absolument rien qui vous concerne ! répliqua-t-elle furieuse. Aussi je vous conseille vivement de me rendre ce collier qui ne vous appartient aucunement !

    - Sinon quoi… ? coula Rogue dans un murmure onctueusement menaçant.

    Prise de court face à la répartie froide et dangereusement calme du Maître des Potions, la jeune femme n’osa opposer aucune réplique spontanée. Serrant les dents de frustration et d’une rage difficilement contenue, elle regarda tour à tour les professeurs qui l’observaient intensément, attendant visiblement qu’elle daigne répondre à leurs attentes.

    - Que pouvez-vous nous dire sur cet étrange bijou ? reprit McGonagall avec patience mais fermeté.

    - Qu’est-ce que ça peut bien vous faire ?! rétorqua la jeune femme, refusant obstinément de céder la première.

    - Répondez à la question Annily, intervint Dumbledore. L’objectif de cette assemblée vise sans aucune sournoiserie à clarifier la situation dans ses moindres détails, afin de comprendre chacun des mystères qui vous entourent et ainsi espérer appréhender la logique de cette histoire dans son ensemble. Je conçois que tout ceci représente une combinaison de faits qui vous dépassent, mais en refusant de coopérer vous ne faites que repousser l’inévitable.

    Le ton calme et sans réplique du Directeur eut finalement raison de l’entêtement de la jeune femme, qui abdiqua avec lassitude et une pointe d’exaspération dans la voix :

    - C’est un bijou ! un simple bijou, une parure tout à fait ordinaire, comme on peut en trouver dans n’importe quelle joaillerie… Mais j’y tiens énormément, ce pendentif a beaucoup d’importance pour moi ! Même s’il ne représente qu’une croix en argent, il a beaucoup plus de valeur à mes yeux qu’une simple breloque. Et bien que je ne conserve pas le moindre souvenir de la gourmette que je portais, je n’ai pas oublié l’existence de ce collier !

    - Une croix en argent, dites-vous ? insista le professeur de Métamorphose. Il ne s’agit pourtant pas une croix ordinaire.

    - Pour être plus précise, obtempéra Annily, ce symbole représente l’Ânkh ou la Croix de Vie Egyptienne, qui incarne le don divin de la Vie Eternelle en Egypte. Vous pouvez aisément trouver toutes les explications que vous désirez découvrir sur le sujet dans les livres relatifs à l’Ancienne Egypte. A présent que vous avez obtenu les réponses à vos questions, vous voulez bien me rendre mon collier ? S’il vous plait…

    - Le Crux Ansata, interpréta Dumbledore, pensif. La Croix Ansée… Oui, je connais ce symbole, les antiques Sorciers égyptiens usaient de son emblème lors de l’élaboration initiale de certains sortilèges. Mais votre bijou diffère quelque peu de l’image originelle.

    - Que voulez-vous dire ?

    - Il me semble me souvenir que la Croix Ansée représente un hiéroglyphe parfaitement symétrique. Or, votre pendentif reproduit certes l’Ânkh, avec une particularité cependant : l’une des branches horizontales revient en arc de cercle vers le centre du bijou. Comme si elle avait été… déviée…

    - Quoi ? non, c’est impossible ! déclara catégoriquement Annily. Je connais mon pendentif ; il est la réplique exacte de la Croix de Vie.

    - Dans ce cas, il a pu se déformer durant votre « voyage », avança hypothétiquement McGonagall. Mais je puis vous assurer que votre petit ornement demeure en tout point identique à la description du professeur Dumbledore.

    - Et où est-il ? où est mon collier ? Êtes-vous oui ou non décidés à me le restituer ?

    - La réponse est non, bien évidemment, répondit Rogue d’un ton doucereux. Puisque vous n’êtes pas en mesure de nous fournir les explications requises, il nous incombe d’entrevoir et interpréter certains éléments pour le moins surprenants, excluant toute collaboration de votre part.

    - Mais qu’a-t-il ce bijou, à la fin ?! explosa la jeune femme, au bord de la crise de nerfs. Vous ne cessez de me harceler de questions, vous me soutenez vouloir clarifier la situation, mais vous ne m’expliquez absolument rien !

    - Annily, reprit Dumbledore avec un grand sérieux, je comprends que vous soyez assaillie par une multitude d’interrogations, mais ayez s’il vous plait la patience et l’indulgence de répondre aux nôtres dans un premier temps : maintenez-vous le fait de méconnaître les pouvoirs dont cette croix est investie ?

    - Encore une fois, j’ignore de quoi vous voulez parler !

    - Cela ne semble guère vraisemblable, si l’on considère le fait que ce bijou demeure véritablement votre propriété, argua Rogue d’une voix onctueuse.

    - Pensez-vous réellement que je suis allée jusqu’à feindre la stupéfaction lorsque j’ai découvert l’existence de la Magie ? contra Annily avec véhémence. Si mon pendentif se trouve effectivement investi d’un quelconque pouvoir comme vous semblez le prétendre, et si de surcroit j’en avais eu connaissance avant ce jour, comment pourrais-je simuler un tel degré d’incompréhension et de surprise ? Je ne possède pas un tel don d’actrice ! Encore une fois, je vous affirme ne pas connaître les propriétés extraordinaires que vous semblez conférer à mon collier, un bijou que je porte pourtant depuis des années sans jamais avoir constaté la moindre bizarrerie ! J’ignore réellement de quoi vous parlez, mais peut être accepteriez-vous d’éclairer ma lanterne…

    - Nous serons amenés à le faire, sans aucun doute, répondit Dumbledore avec calme. Cependant, tant que nous n’aurons pas acquis davantage de renseignements concernant votre Croix Ansée si particulière, ceci me semble prématuré. Chaque chose viendra en son temps, conclut-il simplement.

    Comprenant limpidement qu’elle ne récupérerait pas son précieux pendentif, et se voyant refuser davantage d’explications, Annily se résigna à contrecœur et se rassit dans le fauteuil, contrariée et furieuse. Avisant son affliction teintée d’amertume, McGonagall tenta maladroitement de la réconforter :

    - Ne soyez pas ainsi désemparée. Votre bien ne vous est nullement dérobé, mais emprunté pour un temps… disons imprécis. Il vous sera restitué d’ici peu ; le Directeur ne compte pas le faire figurer parmi les objets confisqués aux élèves et qui s’accumulent dans les placards de notre concierge Argus Rusard.

    Abandonnant définitivement le combat dans un soupir compassé, sans pour autant renoncer à l’espérance de voir un jour le bijou égyptien revenir en sa possession, Annily releva la tête et acquiesça doucement :

    - D’accord… J’imagine que pour mériter plus sûrement votre confiance – et par extension, votre protection et votre aide –, il me faudrait en contrepartie accepter de vous accorder la mienne… Que va-t-il se passer maintenant ? Comment envisagez-vous…

    Mais Annily ne put terminer sa phrase ; devenue soudain aussi pâle qu’un cadavre, elle sentit un brusque et puissant engourdissement envahir son corps et l’aspirer vers le néant. Avant même de comprendre ce qui lui arrivait, la jeune femme sombra dans l’inconscience et s’affala sur le sol, livide. Rogue, qui se tenait près d’elle, eut tout juste le temps d’amortir sa chute en protégeant sa tête du choc.

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