Ses yeux verts

Chapitre 24 : Chapitre vingt-quatrième - Hurricane

3114 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/11/2016 08:35

La jeune femme s'est endormie, sur le canapé des appartements du professeur et ce dernier l'observe dormir, détaille son air paisible. Assit à ses côtés dans le canapé, l'homme est encore tout chamboulé par les révélations de la soirée. La jeune femme étendue à ses côtés ayant confessé son amour pour lui, le sorcier a encore du mal à croire ce qui lui arrive. Il n'aurait, pour dire le vrai, jamais pensé cela possible, jamais pensé qu'Ingrid Potter, une fille aussi heureuse de vivre et souriante qu'elle, puisse tomber amoureuse du vieillard précoce, acariâtre, que sa vie l'avait poussée à devenir. Pourtant, les mots de la jeune femme vrillent encore ses tympans, s'y implantant. "Je vous aime !" a-t-elle dit avant de pleurer, inquiète de leur avenir car, même si elle est majeure au regard de la loi, l'homme reste un supérieur hiérarchique puisque son professeur. Et par conséquent, une histoire entre eux est interdite. Poussant un soupir, l'homme détourne le regard de ce visage angélique, réalisant comme la demoiselle a été plus prudente que lui, à vouloir le protéger en taisant ses sentiments, en luttant contre eux. Le sinistre professeur s'en sermonne, ne pensant pas mériter qu'une jeune femme comme Ingrid s'inquiète à ce point pour lui.

 

Que diras-t-elle à son réveil ? Voudra-t-elle tourner la page, faire comme si de rien n'était, en songeant à la dangerosité de cette histoire ? Cette pensée torture l'homme qui, dans un même temps, songe qu'il est déjà trop tard pour faire machine arrière. Ce qui est dit est dit. Et la demoiselle a dit être amoureuse de lui. Se levant du canapé, l'homme fait les cents pas dans son salon. Quoi qu'elle en dise, il ne va pas la laisser continuer à lutter, il s'en fait la promesse. Non, il ne va pas la laisser continuer à se faire du mal en voulant le protéger. Sa décision est prise. Il y a trop longtemps que la vie lui refuse le bonheur et comme dit l'adage, pour vivre heureux vivons cachés. L'homme sent son cœur battre la chamade à cette pensée. Bien sûr, il pense aux conséquences s'ils étaient découverts. Mais il a promit à Lily de vivre d'une part. Et d'une seconde,  l'homme songe qu'avec un peu de discrétion, personne n'en saura jamais rien. Ce sera son argument principal au cas où la demoiselle viendrait à refuser leur histoire.

 

Prenant conscience qu'Ingrid, étendue sur le canapé, a peut-être froid comme les températures sont encore fraîches pour la saisons, l'homme allume un feu dans la cheminé d'un coup de baguette magique. L'humidité de son entre ne lui est pas désagréable mais le sorcier n'a aucunement l'envie de voir sa visiteuse malade aussi la couvre-t-il de l'une de ses capes, pour la mettre plus à l'abris du froid. Reprenant place auprès d'elle, le sorcier remarque que son étudiante dort toujours. Appelant un livre à lui, le professeur l'ouvre, cherche sa page et se plonge finalement dans sa lecture. La salle aussitôt est plongée dans un silence perturbé seulement par le bruit de pages que l'on tourne et du bois crépitant dans la cheminés.

 

La nuit est bien avancée lorsqu'Ingrid s'éveille. Ouvrant les paupières, la demoiselle ne reconnait pas l'endroit où elle se trouve. En revanche, l'odeur qui titille son nez lui est familière. Et cette odeur provient de cette cape qui lui tient chaud. Dans l'âtre, un feu joyeux danse. Un bruit de page qui se tourne. Ayant peur de comprendre, la demoiselle se redresse pour voir le professeur de défense contre les forces du mal assit à ses pieds, le regard perdu sur un livre. Incroyablement, cette scène d'un calme effarant fait du bien à Ingrid et un sourire né sur son visage, l'espace d'un instant. Et puis elle réalise ce qui est arrivé ce soir, ce qu'elle a dit. N'osant pas y croire, elle détourne le regard de son professeur et aussitôt ses joues se parent d'un beau rouge. La situation lui a échappé, complètement. La demoiselle s'en veut un peu. Pourtant, elle se sent tellement mieux, libérée d'un poids...

 

"- Oh Ingrid, te voilà réveillé." lance une voix chaude qui fait frissonner la jeune femme.

 

Severus Rogue qui surveille son éveil depuis le début, intervient maintenant qu'il juge avoir laissé à la rouquine suffisamment de temps pour que son esprit replace les récents évènements. Que va-t-elle dire ou faire maintenant ? Le professeur referme son livre, songeant qu'il va avoir besoin de lutter et d'argumenter pour obtenir le droit de faire vibrer la jeune femme au grès de leur histoire d'amour. Un droit que la rouquine ne lui accordera peut-être pas facilement, elle qui a tant oeuvré ces derniers temps pour fuir ses sentiments.

 

"- Professeur je... je suis désolé pour... pour ce soir." annonce la demoiselle confuse. "Je n'aurais pas dût... dire cela."

 

La jeune femme se souvient de ce qu'elle a dit et, plus encore, de ce que l'homme a dit. Comme quoi il l'aime et chérit les différences qu'elle a avec sa mère. Elle se souvient de la chaleur qui l'a envahie comme l'homme tenait de tels propos. Elle se souvient d'avoir frissonné de plaisir, puis de peur à l'idée de ce que pourrait dire ou faire le ministère s'il venait à apprendre une affaire pareille, ou à la suspecter. Elle se souvient que ce n'est pas prudent.

 

"- Severus. Appelle-moi Severus. Et ne soit pas désolé. Au contraire..." répond l'homme sans aller plus loin dans son propos.

 

"- Ce ne serait pas convenable Monsieur, vous êtes mon professeur. Une élève se doit de traiter respectueusement un enseignant, c'est pourquoi l'utilisation de leur prénom n'est pas autorisé." reprend la demoiselle d'un air qui se veut décidé, pour ne pas céder à la tentation.

 

"- Ingrid je t'en prie, ne nous inflige pas cette peine..." souffle l'homme en s'approchant, avant de couper toute tentative de protestations. "Ce qui a été dit a été dit, nous ne pouvons pas revenir en arrière et je ne le veux pas. Tu ne comprend pas. Je n'ai jamais été si... heureux. Ta sincérité tout a l'heure... Tu ne comprends pas, tu ne peut pas savoir par quoi je suis passé et..." la voix de l'homme d'ordinaire si dur et fier se brise comme il parle du bonheur qu'il connait enfin, qu'il n'a pas connu ou si peu avant cela. Son regard parle pour lui comme il ne sait plus mettre sa pensée en mot.

 

"- Severus je... je ne voulais pas vous... te blesser." murmure la demoiselle soudainement perdue, le cœur égratigné par l'air grave et triste de l'homme qu'elle aime. "Je suis désolé. Mais... j'ai tellement peur de..."

 

"- Rien, pour moi, ne serait pire que de taire ce que je ressens. Je n'ai jamais connu ça Ingrid et... et je ne le mérite probablement pas... Je me fiche bien des risques, je les côtoie depuis si longtemps, on peut dire qu'ils emplissent ma vie mais aujourd'hui... Aujourd'hui j'ai envie de prendre des risques pour quelque chose qui en vaille vraiment la peine pour moi, assez égoïstement..." répond l'homme, coupant ainsi la jeune femme dans ses propos.

 

Rendue muette par les mots de l'homme qui atteignent sa sensibilité de par leur douceur et leur sincérité, qu'elle ne comprend pas forcément tous puisque ne sachant rien des dessins de l'homme et de Dumbledore, la demoiselle - les larmes au yeux - ne quitte plus le regard de l'homme. Son cœur bat à tout rompre dans sa poitrine et elle a tellement envie de se glisser insouciamment dans la félicité de l'amour, sans y parvenir. Mais la sorcière comprend ce que veux dire son professeur et elle comprend, plus encore, ce qu'il veut. Plus ou moins en tout cas. Touchée par lui en tout cas, la jeune femme laisse son regard se noyer dans celui de son interlocuteur. Elle n'ose plus rien dire en cet instant. Et puis, au bout de quelques minutes, la sorcière glisse sa main dans celle de son interlocuteur, posant alors la tête sur l'épaule de ce dernier qui reste interdit. Un frissonnement parcourt l'échine de l'homme. Son coeur manque un battement. Comme il se sent bien alors, la demoiselle ainsi proche de lui. Cette proximité qu'elle décide est, pour Severus Rogue, comme un consentement. Le consentement de son envie de vivre avec lui ce que tout deux désirent. Tout à coup, ce consentement l'effraie. Dans quoi tout deux s'embarquent-ils ? Evidemment, il ne le dis pas à son interlocutrice, mais il a peur aussi. Peur d'embrigader la jeune femme dans les mois sombres qui l'attendent. Egoïstement, le sorcier pourtant chasse ces idées, désireux de garder auprès de lui la source de lumière qui éclaire sa vie depuis quelque mois, la femme qui l'a rendu meilleur, plus agréable à supporter.

 

Les regards se croisent, aucun d'eux ne dit mot, détaillant seulement l'autre. La jeune femme sent son souffle court à mesure que celui de Severus Rogue caresse sa peau. Lui, hypnotisé par les yeux verts, n'ose plus faire machine arrière et avance lentement la tête en direction de celle d'Ingrid. Ils sont peu à peu si proches, la jeune femme s'en sent réellement intimidée. Son cœur tambourine dans sa poitrine, tambourine d'appréhension autant que d'excitation. Enfin leurs lèvres se rencontrent et tout deux frissonnent à l'unisson à ce contact, si longuement désiré, depuis des semaines, ce désir si ardemment réfréné. Assit dans le canapés, devant un feu de cheminé crépitant joyeusement et donnant une ambiance tamisée au salon des appartements du Serpentard, l'aigle et le serpent s'aiment en secret, s'enlacent, s'embrassent. Ni l'un ni l'autre n'ose lâcher l'autre alors que les mains du professeur se sont logées dans le dos de l'étudiante et celles de cette dernière, dans la chevelure noir corbeau, plus douce que n'importe quel étudiant ne pourrait le croire eux qui jugent si mal le maître des cachots. Tout deux ne se lâchent, finalement, que pour reprendre leur souffle. Après de longues minutes, l'homme redescend toutefois sur terre après cette euphorie.

 

"- Bon sang Ingrid  il est si tard..." fait-il remarquer soudainement, ce qui a pour effet de faire sursauter la demoiselle, qui ne s'attendait pas à ça.

 

"- Et bien, on peut dire que quand le grand Severus Rogue reprend la maîtrise de lui-même, ce n'est pas à moitié !" plaisante la demoiselle. "Permettez-moi de vous faire remarquer, professeur, que l'heure légale du couvre-feu a été outrepassé au cours de la retenue en elle-même." reprend-t-elle avec sérieux, rappelant à l'homme qu'il est responsable de l'absence de la demoiselle dans son dortoir, ce qui ne la dérange pas à vrai dire.

 

"- Severus." la corrige-t-elle. "Et c'est exact." répond-t-il simplement avant de retrouver le silence, se plongeant dans ses réflexions. "Je peut te raccompagner à ton dortoir mais, vu l'heure qu'il est, si nous croisons Rusard il croiras que je t'ai attrapé en pleine fraude nocturne, je ne pourrai pas vraiment prétendre qu'une retenue s'est éternisée jusqu'à... une heure du matin." lance-t-il d'un air songeur avant de poser son regard sur la sorcière. "Ou tu peut dormir ici et regagner ton dortoir demain matin. En tout bien tout honneur évidemment !" s'empresse-t-il de dire comme il sent la jeune femme tout à coup intimidée par ses propos. "Je peut dormir sur ce canapé et te laisser la chambre sinon." propose-t-il encore.

 

"- Euh... Oui je... je suppose que dormir chez vous est... la meilleure solution."

 

"- Chez toi." corrige le sorcier de nouveau. "Ingrid... Garde le vouvoiement pour le public, non ?"

 

"- J'ai peur que... de me mélanger les pinceaux... devant les gens..." fait remarquer la demoiselle en rougissant, ne souhaitant pas que le sorcier la pense distante simplement parce qu'elle n'est pas prête à passer si facilement du vous au tu.

 

L'homme ne répond rien, acquiesçant d'un signe de tête avant de se lever, indiquant à l'étudiante de le suivre. Ils prennent donc la direction de la chambre où l'homme invite la rouquine à entrer. Naturellement, elle y découvre une décoration dans les tons de vert et d'argent, digne d'un directeur de la maison Serpentard.

 

"- Cela vous... te ressembles bien..." murmure la demoiselle un peu gênée par l'emploi du tutoiement, mais désireuse de briser l'air glacial qui semble s'être infiltré entre eux après son précédent refus.

 

"- Tu peut t'installer pour la nuit." répond-t-il d'un air pragmatique et détaché. "Bonne nuit Ingrid." lance-t-il avant de tourner les talons pour aller passer sa nuit sur le canapé.

 

Il n'a pas fait trois pas que déjà, Ingrid le suit en l'appelant et, quand il se tourne vers elle, les joues rosies, la demoiselle demande s'il ne voudrait pas plutôt profiter du confort de son lit. Si bien que quelques minutes plus tard, tout deux prennent place, chacun d'un côté du lit. Ingrid, tout comme Severus sent son cœur battre la chamade. Juste avant qu'il n'entre sous les draps, la rouquine a aperçut le torse nu du sorcier et cela la met quelque peu mal à l'aise. De son côté du lit, la demoiselle imagine la peau de l'homme contre la sienne et se sent rosir à cette seule pensée. Déglutissant, fixant le plafond, la jeune femme n'ose rien dire. Jamais elle n'a partagé le lit d'un homme et, sachant avec qui elle le partage en prime, la demoiselle ne peu se sentir tranquille. Stressée, Ingrid ne parvient pas à trouver le sommeil.

 

"- Je ne compte pas te dévorer Ingrid. Ni te brusquer non plus." lance l'homme à l'attention de la demoiselle, faisant tressaillir celle-ci. Pour autant, il n'y a dans sa voix qu'une pointe d'amusement, qui incite finalement Ingrid à le rejoindre, ou tout du moins à s'approcher.

 

"- Je n'ai pas l'habitude." s'excuse la demoiselle.

 

L'homme se tournant vers elle passe finalement un bras autour de la taille de la demoiselle. Lui non plus n'a pas l'habitude et ne sait pas forcément comment faire ou comment il doit se comporter. Alors il y va à l'instinct, même si ça ne lui a pas toujours servit, en témoigne son clash avec Lily Potter, des années plus tôt.

 

"- Moi non plus." finit-il pas avouer.

 

"- Apprenons ensemble alors..." propose nerveusement la demoiselle.

 

Après l'acceptation de Severus, le silence s'installe et tout deux se rapprochent l'un de l'autre, essayant d'oublier leur nervosité pour passer une bonne nuit. Enfin, après de longues minutes, Morphée les entraine à sa suite et fait naître deux sourires sur leurs visages. Demain est un jour nouveau, un jour qu'ils veulent et vont vivre à deux, désormais.

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