Ses yeux verts

Chapitre 35 : Chapitre trente-cinquième - Quand gronde l'orage

2063 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/11/2016 05:29

Au lendemain du bal de Pâques, c'est dans la salle sur demande qu'Ingrid se réveille, empêtrée dans sa robe de bal. Glissant une main sur le côté, la Serdaigle tapote le matelas. Rien. Se redressant, la demoiselle observe la salle autour d'elle, essayant de rassembler ses esprits, de se souvenir de sa fin de soirée. Elle se souvient d'avoir retrouvé Adrien dans la grande salle, refusant toutes les danses proposées par le jeune homme. Ils s'étaient finalement assit à une table avec d'autres de leurs amis pour boire et manger, parler. Le Serdaigle n'avait pas manqué de jeter quelques regards à sa compagne de la soirée, ne comprenant guère son attitude. Jalousement, il avait l'impression de l'avoir davantage vu danser au soir du bal de noël, dans les bras du professeur Rogue. Il ne faisait part à personne de ses réflexions, ni de son désarroi face à la distance qu'il sentait entre la jeune femme et lui. Il se contentait de la regarder, de parler dans grande joie avec le reste de la bande. La soirée n'avait pas été terrible finalement. De son côté, en présence de ses amis, Ingrid s'ennuyait ferme. Elle aurait voulu danser, évidemment. Mais pas avec son cavalier. Même si elle évitait soigneusement d'accorder un regard au professeur Rogue, c'est à lui que la demoiselle ne cessait de penser à chaque nouvelle musique qu'elle entendait, chaque nouvelle danse qui s'ouvrait.

 

Comme la demoiselle quitte le cheminement de ses pensées et souvenirs, observant de nouveau l'environnement qui l'entoure, son regard croise bientôt la silhouette qu'elle cherche depuis tout ce temps. Tout du moins, un bout de cette silhouette. Installé dans le canapé face à la cheminé, le professeur Rogue tourne le dos à l'étudiante et seul le sommet de ses cheveux noirs dépasse, trahissant sa présence aux yeux d'Ingrid qui, se levant dans sa toilette verte, le rejoint en quelques enjambées. Alors qu'elle prend place auprès de lui, sur l'accoudoir du fauteuil, la jeune femme remarque l'air soucieux arboré par le maitre de potion. Comprenant sans mal les raisons de cette mine qu'il affiche, la rouquine prend le partit de ne pas parler, de simplement poser en douceur sa tête sur l'épaule de l'homme comme pour manifester présence et soutient, au besoin. Avec le temps, elle commence à apprendre comment apprivoiser le loup solitaire sur lequel elle a jeté son dévolu.

 

"- Il a faillit faire un arrêt cardiaque." marmonne soudainement l'homme. A ces mots, Ingrid relève la tête, l'observant sans comprendre. "Dumbledore, quand tu as fais ton apparition hier soir." explique-t-il alors pour chasser l'air interrogateur affiché par la jeune femme.

"- Oh. Je n'en demandais pas tant." s'excuse-t-elle.

"- Tu joue avec le feu Ingrid."

"- Je sais. Je ne compte pourtant pas arrêter. Et je trouve que tu es mal placé pour me dire cela, Severus." fait valoir la jeune femme avec un regard réprobateur, arrachant un soupir à ce dernier.

"- J'imagine que le choix n'était pas anodin ?" interroge le sorcier après quelques secondes.

"- Non, en effet. Cela peu paraître puéril mais je voulais qu'il sache... que même s'il nous poussait à nous séparer, il ne pouvait pas détruire ce que nous ressentons et que tu es une moitié de moi-même. Une Serdaigle habillée aux couleurs de Serpentard, je crois que peu de monde s'en est remis..." lance la demoiselle amusé. Mais son professeur, lui, ne rit guère, ce qui calme rapidement la jeune femme.

"- On pourrait se faire prendre." fait-il remarquer alors, d'un air réprobateur.

"- Laisse-moi rire. Tu imagine un seul de ces cornichons capable de t'imaginer amoureux ? Amoureux d'une non-Serpentard qui plus est ? D'une élève en prime ? De la sœur Potter pour couronner le tout ? Aucun n'a assez de... flair, d'intuition, d'imagination, pour imaginer quelque chose d'aussi improbable. Avouons-le, ça l'est. Qui pourrait parier sur nous ? Aux yeux de tous, tu es limite un monstre terrifiant, sans cœur et j'en passe." s'amuse la demoiselle pour rassurer son compagnon. "La seule qui en a parlé, au début de l'année, plaisantait là-dessus en disant que la situation pourrait être pire et qu'au lieu d'être physiquement attiré par Malefoy, je pourrai être amoureuse de toi. Cette fille c'est Luna et tout le monde croit qu'elle est complètement perchée !" lance-t-elle, déclenchant un léger tic chez le professeur comme il repense à l'air ahuri perpétuel de Miss Lovegood. "Après si cette robe ne te plaît pas, tu peut le dire sans prétexte." susurre la demoiselle avec amusement, à l'oreille du sorcier.

 

En quelques micros secondes, sans qu'elle ne comprenne trop comment, Ingrid se retrouve dans le fauteuil, assise à l'ancienne place du professeur Rogue qui se tient, pour sa part debout devant elle, une main sur chacun des accoudoirs, le visage proche du sien.

 

"- Cette robe est une torture. Pour les yeux. Et pour les nerfs." souffle-t-il.

"- Pour les nerfs ?" questionne la demoiselle sans comprendre ce qu'il insinue.

"- Oui, pour les nerfs... Pour résister à l'envie de te l'enlever..." souffle le maître des potions avant de se redresser, s'arrachant à la contemplation de ces yeux vers plantés dans les siens.

 

Ingrid le regarde s'éloigner de quelques pas, bouche bée, n'osant plus rien dire. Âgé de trente-sept ans depuis le 9 janvier dernier, il est normal qu'il puisse avoir ce genre de pensée au sujet de leur relation. Ingrid, moins mature du haut de ses dix-huit ans n'a à vrai dire pas encore envisagé cette dimension, toutefois normale dans une relation entre deux adultes. Le silence devient pesant entre eux, ni l'un ni l'autre n'osant commenter ce qui vient d'être dit, jusqu'à ce que finalement la rousse se lève, rejoignant l'homme dont elle attrape doucement le bras, la demoiselle lève vers lui son visage.

 

"- A ce point ?" demande-t-elle, un peu maladroitement.

"- Pas ici, pas maintenant, si c'est ce que tu veux savoir. Ingrid... Tu imagine vraiment que je pourrais penser sérieusement à cela dans les circonstances actuelles ? Avec Dumbledore sur notre dos, à pister mon moindre faux pas vis-à-vis de toi ? Tu es très belle dans cette robe. J'imagine ne pas avoir été le seul à le penser hier soir. Mais il m'en faut bien plus pour perdre mes moyens..." fait-il remarquer d'un ton légèrement narquois.

"- Oh vraiment ? Et si je faisais légèrement glisser cette fermeture éclair dans mon dos ?" le taquine la jeune femme, cherchant à trouver les limites du professeur, sans être sérieuse toutefois dans sa proposition.

"- Ingrid..." gronde l'homme. "Quel mage noir t'as donc mis sur ma route ?" lance-t-il d'un air faussement désespéré. "Tu veux donc que Dumbledore lance à ma poursuite tout les détraqueurs d'Azkaban ?"

"- Il ne le ferait pas." répond du tac-o-tac la jeune femme. "Il a besoin de toi. C'est un point qui peut nous servir, je ne compte pas l'oublier. Il aura du mal à trouver un autre espion pour s'infiltrer chez les mangemorts, recevoir une marque avec les risques que cela comporte dans l'après-guerre, se hisser assez haut dans leur hiérarchie, gagner la confiance du seigneur des ténèbres... Il lui faudrait des années et le temps est malheureusement une chose que nous avons tous assez peu en ce moment. Surtout Dumbledore." fait-elle remarquer d'un air amer.

"- Il pourrait tout à fait me renvoyer de l'établissement et se débrouiller autrement pour m'avoir tout de même à son service. Ingrid... tu ne parle pas de n'importe quel sorcier !" lance l'homme d'un ton agacé.

 

Sans répondre, Ingrid quitte les lieux assez promptement. Toujours dans sa tenue de bal, la jeune femme parcourt les escaliers du château, se rendant à la statue de l'aigle qui mène au bureau de Dumbledore. Elle avait déjà parlé d'aller le voir la veille. Maintenant, ce ne sont plus des mots. Se positionnant, elle donne le mot de passe que lui avait confié Severus quelques temps plus tôt, en "cas de besoin". En quelques instants, la voilà arrivée dans les appartements du Directeur de Poudlard, dont ce dernier est absent. Curieuse, la jeune femme observe le bureau, les objets qui le meubles. Là, le choixpeau magique qui l'a envoyé à Serdaigle. Ici une grande armoire. Là, une glace à l'ennemie. Et des portraits de directeurs. Son petit tour achevé, Ingrid prend place dans un siège devant le bureau du directeur, attendant patiemment que ce dernier arrive.

 

Alors qu'Ingrid s'est arrive depuis seulement cinq minutes, l'homme qu'elle est venue voir fait son entrée dans le bureau. Tout d'abord surpris de voir l'étudiante ici, ainsi vêtue, de si bon matin, l'homme la salue ensuite aimablement, avant de prendre place en face d'elle dans le grand bureau.

 

"- Ingrid. Je suis surpris de te voir. Je ne m'attendais pas à une telle visite. Que veux-tu mon enfant ?" questionne le vieil homme.

"- Faux professeur. Avec tout le respect que je vous dois, cela fait bien deux semaines que vous devez vous attendre à cette visite..." lance la demoiselle, laissant tout le loisir au directeur de comprendre ce qu'elle veux dire par là, avant de poursuivre. "Depuis que vous avez contraint le professeur Rogue à..."

"- Ingrid !" la coupe la voix du concerné qui déboule tout à coup dans le bureau du directeur.

 

Peu après le départ de la demoiselle dans la salle sur demande, réalisant ce qu'elle pouvait faire ou dire, il était partit à sa poursuite, espérant l'atteindre avant qu'elle ne soit arrivé devant l'aigle d'or. Seulement, il avait été trop lent à réagir, ou n'avait pas pris suffisamment au sérieux les propos tenu par la jeune femme la veille pour s'en méfier. Derrière son bureau, par dessus ses lunettes en demi-lune, le directeur de Poudlard observe ce drôle de couple réunit devant lui.

 

"- Severus, assied toi." propose-t-il avant de se tourner vers Ingrid et, poussant un soupir, il reprend." Je t'écoute, Ingrid."

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