Comme la glace

Chapitre 36 : Présomption d'innocence

1797 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 04/07/2017 13:52

7 heures venaient de sonner lorsqu’Hermione se réveilla en sursaut. Le souffle court et les mains tremblantes, elle s’assit sur le bord du lit en tentant de calmer sa respiration. Elle l’avait encore fait, ce cauchemar, toujours le même.

Debout au bord d’une falaise à pic, elle se trouve face à l’immensité de l’océan. Incapable de bouger, incapable de parler, elle est prise au piège. Quand tout à coup, elle ressent une présence maléfique se glisser dans son dos et se rapprocher lentement. Le vent souffle bruyamment et l’air du large lui glace le sang. Une main, blanche et froide comme la mort, vient enserrer son cou. Le démon lui susurre à l’oreille des mots d’une autre langue, tandis que le zéphyr se transforme en bourrasque. La tête de l’homme se rapproche brusquement de la sienne et le vent puissant laisse flotter des cheveux blonds presque blancs contre son visage immobile. Les lèvres effleurent sensuellement son tatouage et lui murmurent de ne pas avoir peur. La voix masculine est violente tout en restant parfaitement calme, la jeune fille la reconnaitrait entre mille. Lorsque le dernier rayon du soleil disparait derrière l’horizon, l’homme pose délicatement ses mains sur la taille de la jeune sorcière et, sans hésitation, la pousse dans le vide. Au moment où elle vient s’écraser sur les rochers, elle ouvre les yeux.

Cela faisait des semaines que ce mauvais rêve hantait ses nuits sans qu’elle ne puisse le faire disparaitre. Elle n’avait pas réussi à dormir sereinement depuis l’accident. La nuit l’effrayait, tant et si bien qu’elle n’osait plus fermer les yeux. Elle attendait que le sommeil la gagne et seulement là, elle capitulait. Les médicaments que lui inoculaient Madame Pomfresh lors de son séjour à l’infirmerie en venaient presque à lui manquer, grâce à eux elle avait fait des nuits sans rêves. Hermione savait que ce n’était qu’une passade, qu’un beau jour elle finirait par tourner la page, du moins l’espérait-elle.

Elle fouilla silencieusement dans sa malle, enfila une veste épaisse et de grosses chaussettes puis se faufila hors de la chambre sans réveiller Ginny. Elle avait l’habitude de venir passer ses vacances d’hiver chez les Weasley, ses parents étaient toujours très pris par leur travail, mais ils trouvaient tout de même le temps de venir au Terrier pour le Réveillon de Noël. Même si la jeune fille adorait sincèrement la famille de Ron et leur quotidien folklorique, les vacances qu’elle avait passées dans son enfance lui manquaient terriblement. Ces derniers-temps, elle repensait fréquemment à ses souvenirs d’enfant, quand elle ne connaissait pas encore l’art de la magie. Quand elle était une petite fille normale.

Hermione descendit les marches sur la pointe des pieds et enfila ses chaussures. Elle ouvrit la porte de la maison et grimaça lorsque celle-ci grinça de mécontentement, puis passa par l’entrebâillement. Le jardin était recouvert d’un délicat voile de rosée. Les gouttes d’eau sur les arbres semblaient figées par le froid de ce matin de décembre. La jeune fille aimait ce silence que seuls les bruits de la nature venaient briser. Elle se sentait en paix et, malgré les frissons qui lui secouaient le corps, elle ne ressentait pas le froid. Elle tourna les yeux vers le soleil et observa ses rayons percer l’horizon. Les premières lumières du jour envahissaient le ciel tandis que la jeune sorcière se plongea dans ses pensées.

Les mois qui l’avaient séparé des vacances de Noël lui avaient paru être une éternité. A sa sortie de l’infirmerie, le monde avait changé. Dans les couloirs, des chuchotements s’étaient rapidement fait entendre lorsqu’elle passait, les élèves la regardaient tour à tour sans lui adresser la parole. Certains semblaient suspicieux, d’autres compatissants mais la plupart paraissait avoir pitié. Harry et Ron avait essayé d’être là pour elle autant qu’ils avaient pu, mais malgré leur présence réconfortante, Hermione ne s’était jamais sentie aussi seule. Le temps n’avait pas fait taire les rumeurs, au contraire, plus les jours étaient passés et plus elles s’étoffaient. On racontait qu’Hermione avait tenté d’embrasser Malefoy, on racontait que celui-ci l’aurait pris comme un affront et aurait voulu lui faire payer. Même les fantômes s’étaient fait passer le mot, toutes l’école avait été envahie par les ragots et les chuchotements mesquins.

De son côté, Hermione s’était plongée dans les études. Savoir que les élèves avaient pitié d’elle la répugnait. Elle n’avait pas réussi à faire taire les murmures, malgré son grade de préfète-en-chef. Plus les jours étaient passés et plus elle avait voulu savoir ce qui s’était réellement passé ce soir-là. Dans sa quête de vérité, elle avait même tenté d’interroger des Serpentard, sans grand succès. Personne ne savait avec précision ce qu’il était advenu de Drago Malefoy. Certains disaient qu’il s’était enfui, seul par une nuit d’automne, d’autres prétendaient qu’il se cachait dans le château mais qu’il ne voulait plus se montrer au grand jour. Hermione, plus rationnelle, penchait pour une version plus logique et plus cohérente. Il s’était probablement retiré à Wiltshire, dans le manoir de sa famille. Toujours était-il que le jeune homme avait déserté sa place de préfet-en-chef depuis le jour de l’accident. Après avoir fait le bilan désastreux de la soirée d’Halloween et avoir constaté l’absence de Malefoy, le professeur McGonagall avait décidé d’annuler le bal de Noël. Personne n’avait émis d’objection, même pas Hermione.

Lorsque la dernière heure de cours s’était terminée, la jeune fille avait souri, pour la première fois depuis des semaines. Elle s’était empressé de faire ses bagages et avait attendu le départ avec une impatience brûlante. Elle avait besoin de ces vacances, partir loin de l’école et des horribles souvenirs qu’elle en avait. Elle voulait se retrouver, et, auprès des Weasley, elle se sentait bien. Même si ses nuits étaient encore mouvementées par les réminiscences des évènements passés, ses journées étaient embellies par la chaleur du sourire de Mrs Weasley. Cette femme était exceptionnelle, elle était même devenue un véritable exemple pour Hermione. Au-delà de son extraordinaire sens de la famille, elle était d’une grande bonté et elle avait un caractère bien trempé. Lors de sa première soirée au Terrier, la jeune sorcière n’avait pas réussi à dormir et elle avait discuté toute la nuit durant avec la mère du Ron. Suite à ça, les deux femmes étaient devenues plus proches et plus complices. Sa présence, bien que parfois étouffante, lui était très précieuse.

Les pensées d’Hermione furent interrompues par le cri poussif d’un volatile. Derrière elle, un gros hibou au plumage gris volait avec difficulté. Vieux et fragile, il semblait sur le point de s’évanouir de fatigue. La jeune fille se précipita vers lui et le retint de justesse avant qu’il ne s’effondre dans ses bras. Dans son bec, il tenait quatre enveloppes blanches fermées par un sceau vert émeraude marqué d’un majestueux « M » calligraphié. La jeune sorcière plaça les enveloppes dans sa poche et rentra dans la maison pour déposer Errol au coin de la cheminée. Elle y alluma un feu et s’assit sur une des chaises en bois de la cuisine. Elle sortit les enveloppes de sa poche et observa la magnifique écriture qui indiquait l’adresse du Terrier. Elle se saisit de la lettre lui étant destinée et déplia le papier.

« Invitation personnelle à l’intention de Miss Hermione Jean Granger.

Très chère Miss Granger,

Vous êtes priée d’assister à la Soirée de Noël offerte par la famille Malefoy, qui aura lieu le 26 Décembre, à 8 heures du soir, au Manoir Malefoy, Wiltshire, Angleterre.

Veuillez agréer, Miss, nos sincères salutations.

Narcissa et Lucius Malefoy. »

Hermione en resta bouche bée. La famille Malefoy organisait une soirée dans leur Manoir et l’avait convié, elle et ses amis, à leur réception. La jeune fille savait à quel point les Malefoy était une famille aisée et très prestigieuse. Jamais elle n’aurait pensé un jour pouvoir pénétrer dans leur demeure, et encore moins avec l’autorisation des propriétaires des lieux. Elle relut les quelques lignes encore et encore jusqu’à se persuader qu’il ne s’agissait pas d’un rêve. Lorsqu’enfin elle se remit de ses émotions, elle s’aperçut qu’un petit morceau de papier plié en quatre avait glissé de son enveloppe. Etonnée, elle le saisit du bout des doigts et le déplia doucement.

« Granger,

Ne prends pas la peine de t’acheter une robe, je t’en ferai parvenir une.

J’espère que ton état s’est amélioré,

Drago Malefoy. »

Hermione pesta de rage. Comment osait-il lui parler, même par écrit, après ce qu’il avait osé lui faire. Elle respira profondément et essaya de calmer sa colère. Elle devait garder la tête froide, après tout, on ne lui avait fait part que de rumeurs, elle ne pouvait pas se fier aux ragots. Même s’il l’avait laissé tomber pour les préparatifs du bal de Noël et toutes les autres responsabilités qui incombaient à sa fonction, peut-être n’était-il pas responsable de l’accident et de toutes les répercussions qui avaient suivies. Il était innocent, tant qu’elle n’aurait pas prouvé qu’il était coupable.

Des pas retentir dans les escaliers.

« Tu es déjà debout Hermione ? chuchota un jeune homme aux lunettes rondes.

- Oui, lui répondit la jeune fille. C’est… c’est toujours ce cauchemar…

- Ça passera, tu verras, lui répondit-il en souriant gentiment. Qu’est-ce que c’est ?

- Ce sont des invitations, à une soirée de Noël.

- Une soirée de Noël ? s’étonna Harry. Mais, qui nous invite ?

- La famille Malefoy. »

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