Amour ou loyauté

Chapitre 10 : Dixième chapitre

Catégorie: T

Dernière mise à jour 09/11/2016 15:32

Dixième chapitre

 

 

 

 

 

Tout au long de cette nuit sans sommeil, Sakura guetta en vain la sonnerie du téléphone. Mais il restait obstinément muet sur sa table de chevet. Dans son esprit enfiévré, les pensées s'entrechoquaient comme des balles de tennis. Naruto. Yumie. Naruto, sa tendresse, ses mains sur son corps, sa bouche contre la sienne... Yumie, enfin endormie, son regard lourd de reproche... Que s'était-il donc passé ? La petite fille avait marmonné des réponses évasives à ses questions, répétant sans cesse que Takami était responsable de l'accident.

Implacable, la lumière du matin traversa bientôt ses rideaux, la trouvant hagarde, échevelée. A la table du petit déjeuner, Yumie fut incroyablement joyeuse, regrettant seulement de n'avoir pas cassé son bras droit, ce qui l'aurait dispensée d'école.

- Et si nous abandonnions les Gloss, Yumie ? demanda doucement Sakura, sirotant sa troisième tasse de café, et avalant sans faim un oeuf brouillé.

- Pourquoi ? demanda Yumie, surprise.

- Nous pouvons difficilement en exclure Takami et je ne vois pas comment vous pourrez vous retrouver aux réunions toutes les deux. Je pensais que tu ne voudrais plus jamais la revoir.

- Ne t'en fais pas, maman. Je peux la supporter. Ce n'est pas comme si je devais vivre avec elle.

L'allusion était claire : "" Ne viens plus me parler de Naruto Uzumaki "".

- Yumie, pourquoi vous êtes-vous battues ? demanda Sakura, cédant à la curiosité.

Le visage de la petite fille se ferma aussitôt et elle se leva sans un regard pour sa mère, gardant un silence obstiné.

- Il a bien dû se passer quelque chose pour qu'elle te casse le bras !

- Ce n'est pas elle qui l'a cassé, mais c'est quand même de sa faute.

- Ne veux-tu pas me raconter ?

- Je n'ai pas le temps, je vais être en retard pour l'école.

Plus tard, au salon de coiffure, chaque fois que la porte du magasin s'ouvrait, Sakura se retournait le coeur battant, espérant voir apparaître Naruto. Les journées du mardi et du mercredi ne lui apportèrent aucun réconfort et lorsque le jeudi arriva, elle était à bout de résistance. Pour quelqu'un qui avait juré de ne jamais abandonner, Naruto avait bien vite battu en retraite, songea-t-elle amèrement. Bien sûr, elle était décidée à ne plus le revoir, mais pourquoi ne téléphonait-il pas ?

Le soir, Takami arriva comme à l'accoutumée à la réunion de Gloss et Sakura courut lui ouvrir, le coeur gonflé d'espoir. Quelle ne fut pas sa déception lorsqu'elle vit disparaître les feux arrière de la Porshe dans la nuit. Désemparée, elle referma la porte. Cette fois, tout était fini. De cela, elle en était sûre. Mais pourquoi se lamentait-elle ? N'était-ce pas ce qu'elle avait voulu ?

Ce soir-là, Junna était venue apprendre aux petites filles à tricoter. Assise à côté de Hinako, Sakura compara la scène avec celles qui s'étaient déroulées quelques semaines auparavant, lorsque Naruto évoluait parmi les fillettes, supervisant la construction des cerfs-volants, la pièce résonnant de la joie des enfants.

Avec impatience, elle guettait l'heure à la pendule. Il faudrait que Naruto vienne chercher Takami, il ne pouvait espérer qu'elle l'attendît dans l'obscurité et le froid.

Lorsqu'enfin les petites filles rangèrent leur tricot et enfilèrent leurs manteaux, Sakura entendit soudain le bruit étouffé de la pluie sur le toit de la maison. Ce son fit écho dans sa mémoire à celui qui avait rythmé leur passion contre les volets d'une maisonnette de rondins. Sa décision était prise, maintenant, mais pourquoi la faisait-elle tant souffrir ?

- Sakura, je pars, lança Junna du pas de la porte. Il ne reste plus que Takami.

- Ah, pardon, j'étais ailleurs.

- J'avais remarqué, plaisanta Junna. Tu étais très distraite, ce soir. Plusieurs fois, je me suis tournée vers toi mais tu semblais à des kilomètres d'ici.

- J'ai travaillé dur, ces temps-ci et je suis un peu fatiguée, s'excusa Sakura, lançant un coup d'oeil furtif à travers la fenêtre du salon.

Par-dessus son épaule, Junna aperçut le pinceau des phares de la Porshe illuminant le perron.

- Voici le père de Takami. Il faut que je me sauve. Viens, Fumika.

- Ne t'en va pas si vite, Junna, s'écria Sakura, soudain agitée. Veux-tu une tasse de café ? Un chocolat chaud pour Fumika ?

- Une autre fois, répondit Junna avec un sourire amusé.

- D'accord, acquiesça Sakura faiblement. A la semaine prochaine.

Croisant Naruto dans l'allée de graviers, Junna et Fumika le saluèrent d'un signe de main. Tétanisée, Sakura se tenait dans l'embrasure de la porte et le regardait s'avancer vers elle, tête nue sous la pluie battante. Son coeur se gonfla. "" Je l'aime "", réalisa-t-elle soudain avec une force poignante.

- Oh mon Dieu, murmura-t-elle, couvrant sa bouche de sa main, comme pour s'empêcher de crier.

D'un bond, il fut se le perron, se secouant comme un chien mouillé.

- Bonsoir, Sakura.

Les yeux bleus cherchaient les siens dans la pénombre et, avec effort, elle se ressaisit.

- Puis-je entrer, ou préfères-tu m'envoyer Takami ?

- Non. Entre, répondit-elle, s'effaçant devant lui. Takami, ton père est arrivé.

La petite fille se leva d'un bond lorsqu'il pénétra dans le salon et courut l'embrasser.

- Regarde, je suis en train de te tricoter une écharpe !

- Qu'elle est belle ! s'exclama son père. Tu te donnes bien du mal pour moi.

- Et alors ? Je t'aime, non ? lança la petite fille, un sourire illuminant son visage.

- Je t'aime, moi aussi, déclara son père, tirant affectueusement une de ses tresses.

Le coeur de Sakura se serra. Il semblait si facile de donner et recevoir l'amour. Mais pas pour elle. Ce sentiment qu'elle venait de découvrir en elle devait être étouffé, emprisonné, jusqu'à ce que, espérait-elle, il disparaisse. Le bonheur de Yumie serait-il une récompense suffisante pour panser les plaies de son coeur ? Yumie. Sakura la chercha des yeux.

- Elle est dans sa chambre, je crois, dit Takami avec un haussement d'épaules. Je crois qu'elle ne voulait pas rester seule avec moi.

Subitement, la petite fille baissa les yeux, embarrassée.

- Vous savez, madame Haruno, je suis désolée pour son bras. C'était...

- Ce n'est pas grave, Takami, l'interrompit Naruto. Peux-tu rester un instant tricoter ici ? Je vais essayer de convaincre Mme Haruno de me faire une tasse de café.

- Bien sûr, acquiesça Takami. Puis, avec un regard en coin vers Sakura : Puis-je avoir du chocolat chaud ?

- Takami !

- Ne la gronde pas, Naruto. Je viens juste d'en proposer à Junna et Fumika.

Il la suivit dans la cuisine brillamment éclairée.

- Junna et Fumika ? As-tu essayé de les acheter pour ne pas te retrouver seule avec moi ? Tu es vraiment lâche, Sakura, dit-il avec un sourire.

S'approchant d'elle, il posa doucement la main sur son cou. Sakura ferma les yeux, frissonnante.

- Naruto, je crois qu'il est préférable que tu ne me touches pas.

- Comme tu voudras.

Il laissa retomber son bras. Sakura aurait voulu crier, tant elle avait besoin de lui, tant elle le désirait. Il s'appuya avec nonchalance contre le buffet, sans la quitter des yeux. Son regard chargé de convoitise la réchauffait, faisait monter les couleurs à ses joues. Saisissant trois tasses, elle les jeta presque sur la table.

- Naruto, dit-elle, avec effort. Tout est fini entre nous. Tu as vu toi-même jusqu'à quelles extrémités peut aller Yumie. Elle est dans sa chambre au lieu de tricoter avec Takami. En aucun cas je ne la forcerai à sympathiser avec elle.

- Et pourquoi ? N'est-ce pas insignifiant en comparaison du bonheur que nous pouvons partager ?

- Non ! dit-elle, lui faisant face. Ne crois pas, Naruto Uzumaki que je troquerai le bonheur de mon enfant pour une... une aventure sans lendemain avec toi !

- Une aventure, Sakura ? répéta-t-il, hébété.

Derrière la douceur de son ton transparaissait sa colère.

- De plus, toute la ville est déjà au courant de notre escapade à l'île de Okushiri ! Et ne me dis pas que je suis trop sensible aux commérages ! Toi, tu n'as jamais vécu ici toute ta vie. Tu es arrivé il y a quelques mois et personne ne s'occupe de tes affaires. Tandis que moi...

- Si tu veux couper court aux commérages, pourquoi ne pas m'épouser ?

Elle laissa tomber la cuillère qu'elle tenait à la main et se tourna vers lui, les yeux agrandis par la surprise.

- Tu m'as bien entendu, dit-il, soutenant son regard sans ciller.

- Tu prends bien soin de ma réputation, Naruto, murmura-t-elle, désolée qu'il ne prononce pas d'autres mots.

- Peut-être. Nous sommes tous deux d'accord sur le fait que nous sommes... compatibles.

Compatibles. Comment pouvait-il résumer ces deux jours passés ensemble à Okushiri avec tant de dédain ?

- Je suis touchée par ta galanterie, répliqua-t-elle sur un ton glacial. Mais tu oublies quelqu'un. J'ai une fille qui déteste la tienne et te méprise. Crois-tu pouvoir fonder une famille heureuse sur des bases aussi fragiles ?

- Ce que je crois, c'est que tant que Yumie sent qu'elle te mène par le bout du nez, elle fera tout ce qui est en son pouvoir pour empêcher qu'un homme, et pas seulement moi, entrer dans ta vie.

Cette accusation indigna Sakura qui, par réflexe, leva la main pour le frapper. Naruto fronça les sourcils et Sakura laissa retomber son bras, honteuse de cet accès de violence.

- Je crois qu'il vaudrait mieux que tu partes, souffla-t-elle.

- Pour une fois, nous sommes d'accord, marmonna-t-il, saisissant son manteau et tournant les talons.

Lorsqu'elle entendit claquer la porte de la maison, Sakura resta longtemps immobile, misérable, jusqu'à ce qu'une odeur de brûlé la ramène brutalement à la réalité. La casserole de chocolat chaud venait de déborder.

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