Born to fight

Chapitre 8 : Ivresse

Catégorie: G

Dernière mise à jour 07/09/2010 13:22

La fête battait son plein. L'alcool servi était un tord-boyau distillé dans un des laboratoires du second niveau. Eve n'avait jamais rien bu d'aussi fort. Tout le monde voulait lui offrir un verre pour entendre sa version de l'embuscade si bien que la jeune fille commençait à avoir la tête qui lui tournait.

Son cerveau embrumé par les vapeurs d'alcool devait répondre au bombardement de questions de ses compagnons. Eve n'était déjà pas du genre bavarde d'ordinaire, la fête tournait au chemin de croix pour elle. Se rendant probablement compte de l'embarras de la jeune fille, John prit sur lui de répondre à sa place. Eve lui fut infiniment reconnaissante pour cette aide inespérée.

Néanmoins, son répit fut de courte durée car Derek Reese l'interpella directement.

« D'après ce que disent les gars, à chaque fois, tu as visé les Terminators au cou. Et à chaque fois, ils se sont écroulés. Comment expliques-tu cela?» lui demanda-t-il, impassible.

Son visage n'exprimait rien. Eve se demanda s'il était resté sobre ou s'il avait développé une résistance extraordinaire à l'alcool. Il donnait l'impression d'être un roc comparé à elle qui commençait à voir tanguer la pièce.

Elle le regarda un instant, tentant de rassembler ses esprits pour faire une réponse cohérente au lieutenant.

« Le cou est le point faible des Terminators. La gaine de métal qui protège le système de visée est fragile et peut être détruit par du gros calibre. Lorsque ce système de visée est atteint, le terminator est programmé pour le faire basculer automatiquement vers un système de secours. Mais pour cela, il doit se rebooter, ce qui vous laisse environ 70 secondes pour le détruire, lui enlever sa puce ou vous enfuir. »

Son explication fut accueillie par un silence admiratif.

« Comment sais-tu cela? » demanda le commandant Hurley.

« Mon p... Le chef de la base de San Diego avait beaucoup étudié les terminators. » Hurley échangea un coup d'œil silencieux avec Murdoch mais n'ajouta rien.

Eve jeta un coup d'œil furtif à John mais celui-ci ne semblait pas avoir relevé son hésitation. Allison lui chuchotait quelque chose qui le fit sourire jusqu'aux oreilles.

Peu de temps après, les deux tourtereaux quittèrent discrètement la fête. Eve soupira. Dorénavant, elle allait devoir répondre seule aux questions de ses joyeux compagnons. Heureusement, Hurley et Murdoch s'éclipsèrent également. La jeune fille n'aurait plus à supporter leurs regards inquisiteurs et leurs échanges silencieux.

Un peu plus tard, Rigbey tint absolument à ce qu'elle avale cul sec en même temps que lui un verre du liquide infâme qui leur servait d'alcool. Et Lanson ne la lâcha pas avant qu'elle concède au même rituel avec lui. Sa gorge était en feu et ses joues la brûlaient.

Elle tituba vers une chaise sous les rires et les plaisanteries de ses compagnons.

« Tu devrais manger quelque chose. » lui dit Derek qui s'était rapproché d'elle.

Elle cligna des yeux, pas sûre d'avoir bien compris. Elle vit qu'il lui tendait un paquet de gâteau. Elle se saisit du paquet maladroitement.

« Comment vous pouvez boire un truc pareil et tenir encore debout? » lui demanda-t-elle en mâchouillant un biscuit sec.

Derek rigola puis s'assit sur une chaise près d'elle.

« Faut croire que j'ai l'habitude. »

« Moi je tiens pas l'alcool. » répondit Eve, d'un air morne.

« Je vois ça. »

La jeune fille lui adressa une grimace qui fit rire Derek. Malgré ses dires, Eve était persuadée que l'alcool lui faisait tout de même un peu d'effet. Derek semblait bien trop décontracté pour être dans son état normal.

Elle l'observa un instant puis, sans réfléchir, lâcha : «Je préfère quand vous souriez. »

Derek afficha une mine surprise et Eve ne put s'empêcher de pouffer comme une petite fille devant sa propre audace. Face à l'ivresse manifeste de la jeune femme, Derek se contenta d'un sourire indulgent. En réalité, il appréciait de la voir ainsi. D'ordinaire, elle donnait toujours l'impression de toujours tout maîtrisé, c'était la première fois qu'il la voyait se lâcher un peu. Et ça commençait plutôt bien.

« Vraiment? »

Eve secoua la tête vivement.

Il se pencha un peu vers elle. « Moi je préfère quand tu es saoule. »

« Je suis pas saoule! » se défendit-elle.

Derek fit une moue dubitative.

« Bon okay, peut-être un peu. » accorda Eve.

Le silence s'installa entre eux pendant quelques instants. L'humeur d'Eve s'assombrit alors qu'elle contemplait les hommes qui riaient et s'apostrophaient en face d'eux. Derek suivit son regard. A plusieurs reprises, il avait observé le changement brutal d'attitude de la jeune fille. Elle semblait très lunatique.

« Tu les a beaucoup impressionné, tu sais. Et pour impressionner ces gars là, faut vraiment en faire... » constata-t-il.

Eve haussa les épaules.

« C'est ridicule de faire un plat de tout ça. J'ai eu de la chance, c'est tout. J'espère qu'ils vont vite oublier cette histoire.» fit-elle, presque irritée.

« Je ne crois absolument pas à la chance. » dit-il en se penchant un peu vers elle.

A son tour, elle se rapprocha de Derek.

« Ce que j'ai fait, c'était du suicide. Le meilleur moyen de quitter cet enfer. » Elle haussa les épaules. « Mais tout le monde semble trouver ça formidable ... » lui confia-t-elle, le regard sombre.

« Tu tiens donc si peu à la vie. » constata-t-il.

Eve baissa les yeux.

« Je... je ne sais pas. » Elle fronça les sourcils, cherchant le meilleur moyen d'exprimer ce qu'elle voulait dire. « C'est juste que, quelquefois, je me demande si cette vie-là vaut la peine qu'on se batte pour elle. Au fond, je crois que je suis lâche. C'est pour ça que ça me fout les nerfs qu'on me cite en exemple. »

Derek comprenait très bien ce que ressentait Eve. Tout soldat connaît ces moments de découragement où l'envie de tout abandonner surpasse les idéaux et les grands principes.

« Détrompes-toi. Tu es quelqu'un de très courageux et il faudrait être stupide pour ne pas s'en apercevoir. »

Eve lui lança un regard incertain. Elle semblait soudain si fragile que Derek avait envie de la prendre dans ses bras pour la rassurer. Bien sûr, c'était impossible avec les gars à côté.

Elle lui sourit timidement.

« Merci. » dit-elle simplement.

Ils étaient très proche l'un de l'autre. Le désir de la toucher brûlait les mains de Derek.

Il serra les mâchoires. « C'est la vérité. »

« C'est vous qui devriez être montré en exemple. Pas une tête brûlée comme moi.»

« Enfin une parole sensée! » rigola Derek en se redressant un peu.

Eve sourit. Ils étaient moins proche maintenant mais la tension entre eux était encore palpable.

« Qu'auriez vous fait si le jugement dernier n'avait pas eu lieu? » lui demanda-t-elle, en changeant de sujet brutalement.

Derek réfléchit un instant.

« Je crois que j'aurais été musicien. »

Eve éclata de rire.

« Quoi ?» demanda Derek, faussement vexé.

« C'est que je ne vous vois pas du tout en musicien, mon lieutenant. » expliqua Eve en essayant de se reprendre.

« Tiens donc! Et toi qu'aurais tu fais? »

Eve réfléchit un moment

«Je ne sais pas. Soldat, je pense. C'est tout ce que je sais faire de toute façon. » finit-elle par avouer sans parvenir à cacher la tristesse de sa voix.

A nouveau, Derek sentit ses bras le démanger de l'envie de la prendre dans ses bras. Elle était si jeune et, pourtant, elle paraissait si usée par la guerre. Il n'aurait jamais imaginé qu'une telle fragilité puisse se cacher derrière l'assurance qu'elle affichait ordinairement.

« De tout façon, ça ne sert à rien de se triturer l'esprit avec ce qu'on aurait pu être ou pas. Nous sommes ce que la guerre a fait de nous et rien ne pourra changer cela..» dit Derek en haussant les épaules.

Eve sourit pour elle même.

« Peut-être ... » dit-elle.

Derek allait lui demander ce qu'elle voulait dire lorsqu'elle se leva brusquement. Elle vacilla dangereusement mais réussit à se stabiliser.

« Je vous remercie pour ce moment, mon lieutenant, mais j'ai vraiment besoin de retourner me coucher maintenant. » Elle lui adressa un faible sourire et s'en alla vers la sortie.

Derek acquiesça et la regarda partir à contre cœur. Cette fille était si mystérieuse, si insondable. Il aurait voulu percer à jour tous ses secrets, tous ses silences.

Son départ sonna la fin de la fête. Kyle était totalement ivre et Derek dut le soutenir pour le ramener jusqu'à leur quartier.

Lorsqu'il l'étendit sur sa couchette, Kyle l'attrapa par la nuque.

« Je t'ai vu la regarder! Elle te plaît. » lui souffla-t-il au visage.

Derek réussit à se dégager.

« Tu ferais mieux de dormir! » le sermonna-t-il.

Kyle ricana. « Elle te plaît! Ça crève les yeux, mon frère. »

Derek l'ignora et Kyle se mit à ronfler quelques secondes plus tard.

Il s'allongea à son tour sur sa couchette et soupira. Kyle était loin de la vérité. Il était raide dingue de cette fille. Sa manière de sourire, sa façon de bouger, de le regarder, presque sauvage, le mettait dans un état pas possible. Il la désirait comme un fou et il mobilisait toute sa volonté pour résister à ce désir.

Lorsque les premières femmes avaient rejoint les rangs de la résistance, il avait été décidé d'interdire les relations hommes-femmes entre les combattants. Et Derek avait été un fervent partisan de cette règle. Enfin, jusqu'à maintenant.

 

 

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